Jazz à Dissay : retrouver le goût si singulier du jazz
- Armand Meignan

- 18 juin
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 29 juin
Voici venu le temps des festivals de jazz de l’été, avec leurs programmes copieux, chargés de "stars du jazz" : Robert Plant, Air, Ayo (Antibes), Ben l’Oncle Soul, Tiken Jah Fakoly, Kassav (Jazz à Vienne), Feu! Chatterton, Mustard, Jorja Smith (Nice Jazz Festival), Santana, Robert Plant, Tiken Jah Fakoly (Jazz in Marciac), etc.
Quelle est donc cette étrange maladie qui les frappe tous ? Quel est cet étrange désir de programmer des stars de l’électro-disco-funk-hip-hop-rap-reggae-ska-punk ou des figures du rock et de la variété jazzy finissante ? On a même vu Village People à Jazz à Enghien en 2024 ! Et pourquoi pas bientôt DJ Snake à Marciac ? Étonnant, non ?
Il faut reconnaitre que le jazz a toujours aimé s’acoquiner avec les musiques les plus diverses. Les plus grands l’ont d’ailleurs subtilement fait (Miles, Coltrane, Gillespie, Carla Bley…). Mais là, ce n’est plus du "métissage" réussi. C'est un peu comme si les festivals de musique classique programmaient Mylène Farmer ou Zaho de Sagazan, accompagnées par un orchestre symphonique, pour faire croire que c’est aussi bien que Mozart ou Bach !
On vit donc une époque formidable... Le jazz est presque mort : ses grandes figures récentes ne jouent plus (Rollins, Jarrett, Portal...) ou sont parties bien loin (Shorter, Corea, Solal, Carla Bley, Lockwood…). Et pourtant la nouvelle génération américaine, européenne, française est tout à fait passionnante et créative... mais elle n’a pas la même capacité à attirer un public nombreux, et donc à être programmée en priorité dans ces festivals d’été !
Aujourd’hui, les publics des festivals de musique veulent du light show, du spectacle, du festif… ils viennent pour faire la fête ! Et pourquoi pas ? Mais écouter vraiment de la musique, savourer un son de saxophone ou de contrebasse devient presque secondaire…
Où sont les publics d’antan, qui venaient pour écouter le son d’un Gary Peacock, celui d’un Archie Shepp, les frottements de cymbales d’un Daniel Humair, le drive d’un Roy Haynes, la poésie rythmique d’un Paul Motian, le toucher d’un Brad Mehldau, le groove d’un Eddy Louiss, le Lonely Woman d’Ornette ou le Kind of Blue de Miles, etc. ?
Et puis il y a une bonne nouvelle. Au milieu de l’été, il reste quelques îlots de résistance : des petits festivals de trois jours, sans trop de subventions ni de mécénat, n’existant qu’avec la volonté farouche de quelques bénévoles passionnés, qui résistent et programment du jazz qui s’écoute d’abord avec les oreilles et le coeur, et pas seulement avec les pieds...
Jazz à Dissay (3 143 habitants dans ses meilleurs jours), dans la Vienne, son château et son église du XVe siècle, son maire (musicien et fana de jazz), son public attentif et nombreux, est de ceux-là !
Sa programmation essentiellement européenne (qui n’exclut pas des invités américains certaines années), Dissay fête ses 5 ans d’existence avec ses compagnons de route de la première heure (Sclavis, Pifarély...).
Programmation créative : 2 concerts acoustiques dans l’église, 5 dans la cour du château (magnifique !), 1 lever de soleil le long du Clain à 9 h du matin... Et 16 musiciens et musiciennes invités pour 8 concerts, accueillis comme des amis :
François Couturier, Émile Parisien, André Minvielle, Géraldine Laurent, Francesco Bearzatti, Sarah Murcia, Guillaume de Chassy, Julien Touery, Yvan Gelugne, Julien Loutelier, Federico Casagrande, Louis Sclavis, Dominique Pifarély, Benjamin Moussay, Olivier Laisney, Christophe Lavergne...
Vous ne verrez pas Robert Plant ni Ben l’Oncle Soul à Jazz à Dissay 2025, mais quelques musiciens et musiciennes importants du jazz d’aujourd’hui, qui vous donnent rendez-vous en offrant, avec grande générosité, le meilleur d’eux-mêmes !
Jazz à Dissay, c’est un festival pour être ensemble et retrouver le goût si singulier du jazz !
Par Armand Meignan


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